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Monsieur & Madame Croque

Imaginez, si vous voulez, un homme et une femme allongés l’un à côté de l’autre, derrière une vitre légèrement fumée. Ils brillent pratiquement de chaleur et la femme ne porte qu’un bonnet; L’homme, une robe soyeuse, nu en dessous.

Bienvenue en France. C’est l’heure du déjeuner, et vous venez de rencontrer les plus sexy du pays : Monsieur et Madame Croque. Omniprésent dans les meilleures boulangeries et brasseries de Paris, ce couple est chaud comme l’enfer et prêt à faire la fête.

Notre histoire de deux sandwichs commence à la fin du siècle, bien que les origines précises du couple soient difficiles à cerner. Une chose est certaine : leurs noms se traduisent, grosso modo, par M. et Mme Crunchy. De ce côté-ci de l’Atlantique, tout sonne plus chic en français.

Comme pour beaucoup de sandwichs de cette série, il y a un récit établi à Les Croques, qui, après un examen attentif, s’avère être une baliverne totale. Publié dans les journaux français, ainsi que dans le dépotoir numérique sans fond de mauvais blogs encombrant Google, le mythe raconte qu’un restaurateur nommé Michel Lunarca, qui dirigeait le café Bel Age près de l’Opéra de Paris, s’est retrouvé à court de baguettes et a été forcé – quelle horreur – de servir un jambon grillé et du fromage sur du pain de mie tranché un jour de 1910. Cette mésaventure s’est avérée être une bénédiction déguisée : le plat s’est répandu et est devenu aimé, bla bla bla. Arrêtez-moi si vous avez déjà entendu cela.

Certainement. Je ne sais pas pourquoi l’idée que les sandwichs fantastiques doivent surgir par accident au lieu d’un génie culinaire prémédité est si convaincante, mais elle est apparue dans les légendes du club sandwich, de la carrozza et bien d’autres. Quoi qu’il en soit, Lunarca était peut-être un gars de relations publiques avisé – il y a une sous-légende bizarre, répétée dans Le Figaro parmi d’autres sources françaises, selon laquelle le sandwich est appelé le « croque-monsieur » parce que Lunarca plaisantait avec les clients qu’il était fait de chair humaine – mais il existe des preuves textuelles datant de la fin du XIXe siècle. Le premier exemple de la collection de la Bibliothèque nationale de France est une chronique d’une édition de 1887 du journal socialiste-anarchiste Le Révolté, qui condamne le « croque-monsieur béarnais » comme un exemple des « délices patriciens » et des « adultères suaves » de la bourgeoisie. Encore une fois : le côté sexy de ces sandwichs ne peut être nié.

Monsieur *Croque Monsieur*, Michel Lunarca, et une mention précoce de sa création

L’équivalent distaff, le croque-madame, a une origine encore plus trouble, alors je vais simplement aller avec le mythe de la connerie sur celui-ci: Le Figaro nous informe que l’œuf au sommet du croque-madame, qui est par ailleurs identique au croque-monsieur, est censé ressembler à un bonnet de dame.

Le couple, lisse, carré et heureux, est destiné à l’amour éternel, richement vêtu de béchamel chic et de gruyére. Ils sont parfois rejoints par le croque-mademoiselle végétarien plus léger, conduisant à la notion d’une société entière de Crunchies, tous exigeant d’être formellement appelés par leurs titres. Ce couple genré n’est pas le seul terme de la cuisine française à évoquer une certaine intimité : béchamel, , , velouté hollandaise etc., sont connus sous le nom de « sauces mères » ; la double ébullition oblige à imaginer Marie se prélasser dans son bain. Source

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